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Billets d'humeur musicale

A la recherche d’un éditeur musical…

Semaine 1 : un espoir en attente

Ma messagerie est vide, désespérément vide. Depuis que mon message est parti de mon ordinateur, l’enthousiasme de départ s’est progressivement transformé en une incapacité à écrire.

Tel un train avançant dans la solitude de la nuit luttant contre les vents crus, j’étais devenu vide desservant de gare en gare cette incompréhension. J’étais pourtant sûr que cette chanson-là avait un réel potentiel.

Mon regard était peut-être situé trop haut ! Quand l’oreille désenchantée revenait vers le bas soleil toute écorchée d’avoir mal entendue.

Ma chanson était devenue une simple sirène d’usine, elle qui pourtant décriait dans son texte le silence des hauts-fourneaux de nos campagnes désindustrialisées.

Là, sur le quai je suis resté au point mort. Vers quels cantonnements allés ? Je ne suis plus prêt à prendre des coups de griffes gratuitement.

Faire entendre une de ses chansons à un éditeur musical, c’est comme se découvrir, on se dissout de ces avis et de ces avis reçus jusqu’à en finir tout nu.

A la moitié de ma vie, toujours aucune signature de la part d’un éditeur pour l’une de mes œuvres. Mes chansons doivent être sacrément mauvaises !

Ne me reste plus qu’à dormir, ma main pendant du lit comme du bordage d’une barque, que les étoiles semblent loin…

A chaque nouvel envoi, le fossé se creuse davantage soulevant chez moi des remous de plus en plus rapidement. Je voyais les éditeurs de plus en plus comme un bloc de béton habillé de barbelés serrés au détour d’un sentier en chicane miné.

Et à mes pieds, rien ; mais dans mes pensées, trois pistes : la ligne droite bien sûr ; la voie de la persévérance qui nous oblige à poursuivre coûte que coûte le chemin de la professionnalisation, le ruisseau située tout juste à côté au risque de m’y noyer ou bien le choix de m’installer sur le plateau de la clairière proche de la forêt pour définitivement prendre de la hauteur sur le métier d’auteur-compositeur.

Il devait bien y avoir des embrasures sur ce blockhaus voire des marches d’escalier pour y entrer. Ce bloc ne pouvait pas être une île déserte inatteignable. Voilà, tel était l’humeur du moment à la fin de la première semaine sans nouvel de la part de l’éditeur musical.

Après tout, lui qui a travaillé avec les plus grands artistes, pourquoi s’intéresserait-il à cette chanson ? Cela ne devait être qu’un disque de plus à écouter pour lui sur sa paire de Cabasse.

Semaine 2 : la relance

Étrangement, je me suis mis à regretter l’époque bruissante des fils de télégraphe. Perché dans ma cabane en haut de l’arbre, comme sur un toit dont on eût retiré l’échelle, j’étais seul dans mon donjon avec ma chanson. C’est comme si l’éditeur se tenait toujours à un demi-lieue de moi à égale distance, tel un fantôme phosphorescent.

La nuit ne dormait pas, j’étais aux aguets dans une sensation de pensées confuses. J’allais tenter une relance auprès de cet éditeur musical connu et reconnu. Il fallait que je trouve une nouvelle route sonore et crissante, une intuition pour réussir à faire table commune et sortir du rôle d’aspirant. Être réserviste à ses limites avec le temps. Il serait enfin bon de respirer un air où l’odeur correspondrait à celle d’une fin d’averse. La vue d’un halo d’intérêt pour cette chanson même tiède serait le bienvenu. A moins que je sois un garçon maudit, un ovni, un homme de la pluie.

Trouver un éditeur de musique pour un auteur-compositeur, c’est comme tomber sur un garde-forestier un jour de brouillard où tu cherches ton chemin sous une couche de feuilles mortes en pleine forêt. Ainsi, même si cela reste difficile, on se doit de garder espoir.

Le sommeil et la fatigue n’auront pas ma plume. Je tiens dans mes mains cette chanson comme on protège un enfant. J’avance dans chacune de mes journées dans la perspective que le prochain brin sera pour ma branche. C’est en moi comme un feu de forêt mal éteint, une mauvais herbe qu’on ne peut point chasser, un chemin à prendre ; celui de la collaboration avec un éditeur musical. Je vais donc le relancer et si d’aventure, il ne devait toujours pas répondre, je n’en prendrai pas ombrage, c’est que mes chansons sont de jeunes pousses qui doivent encore davantage mûrir au soleil.